Abbayes : des moines et un patrimoine.
- Le Gabale
- 25 août 2022
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Dernière mise à jour : 2 sept. 2023
La Contrée du Gévaudan et du Vivarais ont été et sont des terres de la foi. Riches en églises et chapelles remarquables, On y trouve aussi un certain nombre de monastères, certains en ruines d’autres toujours en activité.

Mazan-l’Abbaye
Il s’agit de la première abbaye cistercienne à s’installer dans le Vivarais. Elle aura un rôle majeur dans le réseau des abbayes cisterciennes, en étant la mère fondatrice de Thoronet (1136), Sénanque (1148), Silvanès (1136) et Bonneval (1147).
En 1119, Léger ou Leodegarius, évêque de Viviers, est sollicité par des moines de l’abbaye de Bonnevaux (Dauphiné) désireux de vivre une vie érémitique et cherchant un lieu propice à cette vie. La terre dite « Mas d’Adam » appartenant à Pierre Itier, seigneur de Géorand, et père de Pierre Itier, chanoine de la cathédrale, leur est donnée. Ce dernier quitte alors la cathédrale pour se joindre aux ermites et commencer la construction du monastère.
Au XIIIe et XIVe siècle, l’abbaye constitue une véritable puissance économique, avant de connaître le déclin avec les guerres de religion, et le passage des «routiers» qui rançonnent et pillent la région. Saccagée en 1360, reconstruite en 1375, elle se pare alors de murs d’enceintes, de palissades et de fossés dont subsistent aujourd’hui une tour et un bout du mur.
Commende et décadence.
À partir de 1469, Mazan, comme l’immense majorité des abbayes européennes, tombe sous le régime de la commende : l’abbé n’est plus un moine mais une personne extérieure, ne se préoccupant pas de la règle, mais uniquement des revenus de l’abbaye. Ce régime entraîne dans tous les lieux où il est appliqué une décadence plus ou moins rapide ; c’est le cas à Mazan, où la commende entraîne une très nette baisse de la ferveur religieuse, mais aussi une rapide décrépitude des bâtiments. En 1661, une douzaine de moines seulement vivent dans l’abbaye ; ce nombre sera de six lorsque la Révolution française ferme définitivement le monastère en 1790.
Relativement épargnée, elle succombera en grande partie à l’appétit vorace en pierre de construction des villageois, d’abord pour la nouvelle église paroissiale, et ensuite pour leurs habitations personnelles. Un dernier coup de grâce, en 1905 où on dynamita la voûte pour des raisons de sécurité. Les ruines font l’objet de réhabilitation depuis le milieu des années 1960. La dernière campagne de restauration concerne l’aile occidentale de l’abbaye, conservée en élévation sur sa moitié nord grâce à sa transformation en maison d’habitation aux XIXe et XXe siècles.
Les Chambons
Cette abbaye fut fondée en 1153 par le seigneur de Borne. Devenus seigneurs de Saint-Étienne de Lugdarès, Laval d’Aurèle et du Plagnal, les abbés des Chambons demandent en 1321 l’arbitrage du roi pour le rachat de leurs terres de Borne. Charles IV conclut avec eux un pariage faisant de l’abbaye la cour royale de justice de Borne. Elle va prospérer jusqu’à la guerre de Cent Ans, où elle sera pillée par les routiers. En 1790, à la Révolution Française, il ne reste plus que 7 moines dans une abbaye bien mal en point. Les biens sont vendus aux paysans et les bâtiments servent de carrière. L’église de Saint-Étienne hérite du maître autel, celle des Vans du retable et des stalles. Il ne reste aujourd’hui que le tracé au sol de l’abbatiale et de ses murs. Les restes de l’église et l’une des tours sont les vestiges les plus facilement identifiables, mais ils sont aujourd’hui privés. Comme quasiment toutes les abbayes cisterciennes, celle-ci se trouvait au bord du cours d’eau dont la force motrice était utilisée.
Notre-Dame-des-Neiges
En 1791, le Mas de La Felgère, ancienne grange du Domaine des Chambons, est racheté par Chalbos, un enfant du pays. Ses descendants décidèrent que leur bien devait revenir à l’Ordre monastique qui avait fait la gloire de Mazan et des Chambons. Ils firent des offres à l’Abbaye de Notre-Dame d’Aiguebelle, dans le diocèse de Valence. La fondation fut décidée le 5 août 1850, jour de la fête de Notre-Dame des Neiges, titre de Sainte-Marie Majeure à Rome. Ce sera le nom du futur monastère. Le 25 août, un premier groupe de religieux part à pied d’Aiguebelle, emportant, pour tout mobilier, ce que peut contenir la charrette traînée par un unique cheval. Le 28 au soir, les moines prennent possession du domaine de La Felgère, de sa pauvre ferme et de l’auberge attenante, antique relais entre le Vivarais et le Gévaudan. Onze années passent, le temps nécessaire à l’établissement canonique de la Communauté et à la construction d’un monastère régulier, établi plus bas à la jonction des ruisseaux de Rieufrais et du Val des Loups. Le 16 juillet 1861, les religieux s’y installent au cours de festivités présidées par l’évêque de Mende. Le monastère n’est encore qu’un prieuré, les autorités de l’Ordre hésitant à l’élever au rang d’abbaye à cause des difficultés financières entraînées par l’installation et la construction du Monastère.
Sauvés de l’expulsion par la neige.
En 1880 le pouvoir Républicain s’en prend aux congrégations religieuses, ennemis potentiels du régime. L’expulsion des moines de Notre-Dame des Neiges est fixée pour début novembre. Mais une chute de neige aussi rapide qu’imprévue, sans doute providentielle, l’empêche. Le Père Abbé, craignant un retour de la persécution, veut assurer un refuge à sa communauté. Avec un groupe de moines, il fonde le prieuré d’Akbès en Syrie qui perdurera jusqu’en 1920. En 1912, da

ns la nuit du 27 au 28 janvier, un terrible incendie détruit le Monastère. La communauté prépare immédiatement sa reconstruction : le 2 juillet, la première pierre est posée. Deux ans plus tard, le nouveau monastère est debout.
In vino veritas.
De 1939 à 1945, les privations de la guerre et l’absence de 7 religieux prisonniers se font cruellement ressentir. De 1959 à 1982, l’abbaye réalise des réaménagements importants : la construction de l’hôtellerie, ainsi que l’aménagement des caves et de locaux pour recevoir les nombreux hôtes. Nouveau souffle économique avec l’« œuvre du vin de messe.» À partir des raisins achetés aux viticulteurs de cette région, les Pères produisent des vins liturgiques, mais aussi leurs vins de table, leurs vins mousseux « Fleur des Neiges «, ainsi que d’autres produits monastiques venus d’autres abbayes... Première entreprise du département de l’Ardèche dans les années 90, le rythme économique de Notre-Dame des Neiges va décliner dans les années 2000, avec la fermeture des caves et la démolition de plusieurs bâtiments afin d’alléger le foncier, dont la ferme de la Felgère qui était pourtant à l’origine de l’abbaye. En lieu et place, une simple stèle commémorative sur les gravats…
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